Le virtuose de la musique africaine Prince Ndedi Eyango était chez Laura Dave Média Tv pour présenter son nouveau vidéoclip « Les Enfants du Continent », une chanson à destination de tous les Camerounais pour l’unité. Du haut de ses 40 ans de carrière, l’artiste musicien chanteur, guitariste, producteur et entrepreneur est également revenu sur chacune de ces différentes casquettes , ses rapports avec ses collègues ainsi que ses projets. Évocation dans cet article.
Laura Dave Média (LDM): Nous avons l’honneur et le plaisir de recevoir un virtuose de la musique camerounaise et même africaine. Sa carrière est une école pour les plus jeunes et son talent se bonifie au fils des années. Bonsoir Monsieur Ndedi Eyango et bienvenue à Laura Dave Média.
Prince Ndedi Eyango (PNE): Bonsoir. C’est un plaisir.
LDM: Plus de 40 ans de carrière toujours aussi jeune, c’est quoi votre secret?
PNE: C’est une question qui revient tout le temps. C’est vrai que lorsque je me regarde à travers le vidéogramme « You Must Calculer » et je me regarde maintenant il y a une grande différence. Mais il faut aussi reconnaître que je ne vieillis pas c’est une grâce que Dieu m’a donné.
LDM: Quelle est l’actualité la plus récente du Prince des Montagnes?
PNE: mon actualité est la sortie de mon nouveau single « Les Enfants du Continent ». Nous sommes en train de planifier la promotion.

LDM: Vous êtes à la fois bon chanteur, producteur, guitariste, arrangeur, ingénieur de son. Comment réunir autant de génie dans une seule personne? C’est l’école, un don du ciel?
PNE : je pense que tout ce que nous faisons vient de Dieu. Il y a le don mais le don à lui seul ne suffit pas. Il y a aussi le talent et la vision, ce qu’on veut faire de sa vie , devenir. On essaie de regarder ce que les autres ont fait et on se dit si je veux être un musicien comme tel je dois suivre leurs parcours. Et quand vous aimez ce que vous faites, vous ne voyez pas le temps passer, vous travaillez 24h/24 et c’est ce que j’ai fait pendant ma jeunesse et que je continue d’ailleurs de faire. Et les circonstances à chaque fois nous poussent à se réinventer. Je me rappelle à l’époque j’ai commencé par la guitare après je me suis mis à la composition. Bon guitariste, bon compositeur, je n’étais pas encore chanteur mais après on doit s’exprimer. Ce n’est pas toujours facile de composer pour donner à quelqu’un d’autre pour interpréter. J’avais envie d’être connu, populaire et je me suis dit qu’il me faut une formation, que je me développe au travers des outils informatiques, les programmations, comprendre le langage des studios. Aux États-Unis je me suis forgé dans le son, la production. Je voulais avoir de la connaissance dans toute la chaîne.
LDM: Qui sont les artistes qui vous ont poussé à faire de la musique?
PNE: J’ai commencé avec le groupe Black styl dans lequel il y avait Toto Guillaume que je suivais beaucoup en tant que guitariste et il était l’un des leader du groupe. Il fait partie de ceux qui m’ont inspiré mais dans l’ensemble j’admirais tout ce qui se passait avec Ekambi Brillant, Manu Dibango, Eboa Lottin. Dans la musique étrangère il y avait James Brown qui était bon prestataire. Beaucoup m’ont influencé mais Toto Guillaume est celui que je suivais. Je voulais être comme lui. C’est pour cela que j’ai commencé à utiliser la guitare, son instrument. Après j’ai constaté qu’il était arrangeur et j’ai commencé à faire des arrangements. Il a produit des artistes j’ai commencé à faire la production. En gros, je voulais le copier et j’ai toujours été attiré par les meilleurs. Après si je dis que je n’ai pas été influencé par Lionel Richie, Johnny Hallyday c’est que je mens. Donc il y a des artistes qu’on regardait et on avait envie de leur ressembler. Tous ces gens font partie de ceux qui ont impacté ma jeunesse et le musicien que je suis aujourd’hui.
LDM: Vous commencez à chanter à une époque où il y a déjà de grands noms de la chanson et une grosse concurrence. Parlez-nous de cette époque.
PNE: Beaucoup étaient des auteurs compositeurs et chanteurs. Moi j’étais en plus de ça, musicien. Étant guitariste, j’ai eu la chance de travailler avec les meilleurs il faut le reconnaître. Jacky Ndoumbe, Dina Bell, Moni Bile, Nkotti François, François Missè Ngoh, Penda Dalle, j’étais leur guitariste et je les accompagnais. C’était une occasion pour me former auprès d’eux et chercher à créer mon propre chemin. Je le disais encore à Dina Bell il y a quelques semaines, s’il se rappelle quand j’étais avec eux, je lui demandais à cette époque que faire pour être le meilleur. Lorsque je regardais Elvis Kemayo, Tala André Marie, ils étaient tellement bons que pour quelqu’un qui veut réussir tu te demandes si tu seras parmi les passables, les meilleurs ou les médiocres. Car, on peut être populaire mais on fait partie des médiocres. Moi je voulais être parmi les meilleurs. Même quand j’étais sur scène et que j’accompagnais ces artistes là je réfléchissais sur ce que je peux apporter qu’ils n’ont pas, qu’est ce que je peux faire qu’ils n’ont pas fait. En fait…je cherchais à trouver un chemin et je pense que tout cela m’a permis d’être parmi les meilleurs. Je savais que je suis l’un des meilleurs. Le fait de remplir ces qualités d’auteur compositeur, chanteur et musicien donne une certaine assurance. Comme musicien, j’avais une base pour mener une carrière à long terme.
LDM : « You Must Calculer » c’est votre plus gros succès comme les gens le disent?
PNE: Oui. Avant « You Must Calculer » j’avais déjà fait des chansons comme « Service Libre« , « Vive les mariés » mais, premièrement elles étaient seulement connues au Cameroun. Je me suis demandé si ma carrière allait se limiter au Cameroun et je me suis donné comme défi de trouver un style qui va me propulser en Afrique. Ensuite, j’ai changé de rythme, ma façon de composer, j’ai créé un concept car tout ce que l’on fait dans la vie il faut avoir un concept, il ne faut pas juste le faire comme ça. Du coup, j’ai changé de style , j’ai trouvé un format qui a percé partout en Afrique. Oui je peux dire que « You Must Calculer » a fait de moi ce que je suis et elle reste mon plus gros succès.

LDM: Lorsque vous avez sorti le titre « Patou » en 1989, qui dépeignait déjà la gabegie et la corruption qui minent encore le pays actuellement, vous avez eu des problèmes avec les autorités camerounaises?
PNE : je n’ai jamais été inquiété il faut le dire. Le seul problème que j’ai connu est que à l’époque, seule la CRTV faisait les vidéos et ils ont refusé de tourner la vidéo de « Patou » car chacun disait que c’était comme ci je m’adressais au Gouvernement d’où j’ai pas tourné la vidéo de « Patou » j’ai plutôt fait la vidéo de « Soul Botingo » et « Patou » a fait son chemin tout seul malgré qu’on ne la jouait pas dans les radios, c’était interdit. Mais il n’y avait pas eu une censure.
LDM: Vous disparaissez des radars et de la scène pour les Etats-Unis. C’est une admiratrice qui vous y amène? Pourquoi ce départ?
PNE: Je vais aux USA après une tournée que j’avais effectué en Afrique australe (Zambie, Tanzanie, Kenya, Zimbabwe). A l’époque, toutes mes tournées étaient en Afrique Francophone (Gabon, Côte d’Ivoire, Togo, Bénin, Burkina Faso). Quand j’arrive à l’aéroport il y a une conférence de presse au salon VIP et je ne peux pas m’exprimer c’était d’abord le premier choc et je me suis rendu compte qu’il y’avait un manquement dans ma carrière. Je me suis demandé ce qu’ils aimaient dans ma musique car il n’y avait pas l’anglais. J’ai ainsi fait près de deux mois de tournée en Afrique australe où on parle anglais et je ne pouvais pas communiquer. J’ai passé des moments très difficiles car tout se disait à travers les gestes et signes. Tout cela a été un déclic qui m’a amené à réfléchir. Et à cette époque naissait au Cameroun le multipartisme , il y avait la guerre que les gens ont créé entre le makossa et le bikutsi, une guerre qui n’avait pas lieu d’être, il y avait les villes mortes partout où j’allais et surtout les couvre-feu. On a annulé ma tournée au Gabon, au Togo. En fait, le multipartisme avait créé une peur dans toute l’Afrique francophone. C’est alors que je me suis dis c’est le moment de faire autre chose et sortir du continent car il n’y avait plus de concerts pour faire autre chose. Et c’est tombé que des étudiants m’ont invité pour une tournée aux États-Unis et c’est ainsi que je suis parti . Donc ce n’est pas une admiratrice. Avoir des admiratrices là-bas c’est autre chose. Je me suis dis que c’est le pays de Micheal Jackson , du showbiz je peux me former sur plusieurs choses.
LDM : Vous revenez en 1995 avec le titre « Viji« . Dans le clip, on y voit une belle femme aux allures indiennes, c’était qui?
PNE: C’est mon épouse. Je me rappelle à l’époque nous n’étions pas encore mariés , elle était encore ma copine et je lui ai dédié ce titre que j’avais d’ailleurs déjà composé. Elle est entrée dans ma vie et j’ai changé le titre pour que ce soit son titre à elle. J‘ai demandé si elle pouvait aussi apparaître dans la vidéo elle a accepté. C’était différent, quelque chose de nouveau.
LDM: On est à combien de chansons du Prince Ndedi Eyango aujourd’hui?
PNE: Je ne peux pas compter. C’est vrai que je me suis posé cette question il y a peu. Je sais que j’ai entre 21 et 22 albums mais le nombre de chansons j’aurai l’occasion de les parcourir pour savoir le nombre.

LDM: Après d’autres succès se sont enchaînés, mais surtout une nouvelle casquette, celle de producteur avec votre label Preya Music. Pourquoi avez-vous tenu à ouvrir une maison de production?
PNE: Comme je dis toujours, tout ce que je fais c’est la vision. D’abord, ce que les gens ne savent pas est que avant même d’aller en Amérique, j’étais déjà promoteur culturel. En tant qu’artiste, j’organisais les spectacles sous le label de Preya Music (Prince Eyango Musique), qui existe depuis très très très longtemps. A l’époque il n’était pas légalisé. Lorsque je reviens au Cameroun en 1998 j’ai remarqué une chute complète de la musique camerounaise. Un soir j’ai fait trois boîtes de nuit et on n’a pas joué un seul son camerounais et on était dominé à l’époque par la musique ivoirienne, congolaise. C’est elles qu’on écoutait partout. A mon hôtel au retour, je me suis demandé que faire pour changer la donne. Beaucoup disaient que c’est parce que nous les anciens avons abandonné. Abandonner pourquoi ? Parce que avec l’avènement des villes mortes et du multipartisme, on ne produisait plus, on restait 6 ans sans produire. Maintenant quand on revient devant la scène, il y a une rupture. Je me suis dit que ne peux pas investir sur moi-même et qu’il y a des jeunes talentueux mais qui n’ont pas la chance de trouver comme moi des producteurs car j’ai eu des producteurs étant jeune. C’est comme ça que je décide en 1998 de recréer Preya Music. Après je rencontre pendant mon séjour Longue Longue qui jouait dans des cabarets c’est ainsi qu’on s’est passé nos contacts. J’ai eu l’occasion d’écouter sa première maquette « Ayo Africa » je suis tombé amoureux de la chanson et j’ai signé avec lui. C’est ainsi que j’ouvre la maison de production et quand j’engage Longue Longue il devient tellement populaire que j’ai eu l’envie de faire la même chose avec d’autres jeunes et j’ai continué avec Jacky Kingue et d’autres artistes.
LDM: En tant que producteur, vous avez contribué à mettre en valeur plusieurs artistes de renom. Tout s’est bien passé avec tout le monde?
PNE: Bien se passer non on ne peut pas le dire. Aujourd’hui c’est le passé mais il faut dire qu’il y a eu des tensions. Quand un artiste devient populaire ce n’est plus la même personne du départ qui était dans le besoin. Du coup, il y a eu à l’époque beaucoup de malentendus. Cette situation m’a aidé à réinvestir sur moi-même. Je me disais j’ai tué ma carrière pour produire les jeunes et après ça devient de l’ingratitude que je reçois, autant mieux réinvestir sur moi-même. Mais aujourd’hui quand je regarde en arrière je suis heureux d’avoir fait ce que j’ai fait pour eux.
LDM: De tous ces artistes que vous avez produit, qui est votre plus grande fierté en terme de qualité de travail et de rendement?
PNE : Que ce soit clair, je suis en très bonne harmonie avec eux aujourd’hui. Parfois quand un artiste commence sa carrière il y a beaucoup de manipulations, d’interprétations et malentendus. Je suis aujourd’hui très proche de chacun d’eux. Quand je regarde Longue Longue je suis très fier de lui. C’est un grand artiste. J’ai produit deux de ses albums: « Ayo Africa » et « Demandez à Dieu« . Quand je regarde Jacky Kingue j’ai également produit deux de ses albums et ces œuvres portent leurs images. Je suis fier de Tanus Foe, Marole Tchamba, Junior Eyango. Chacun d’eux a sa particularité et en tant que père je suis fier d’avoir tous ces enfants.
LDM: Comment intégrer le label Preya Music aujourd’hui ?
PNE: Preya Music continue à travailler puisque c’est sous ce label que Ndedi Eyango fonctionne, que les filles Eyango sont sorties. La seule différence aujourd’hui est que nous n’avons pas intégré le côté digital qui est devenu la source même des revenus aujourd’hui. A l’époque, c’était les CD aujourd’hui il faudrait qu’on se réinvente. Avec un peu de chance on verra comment tendre très bientôt la main aux d’autres jeunes.
LDM: Qui était votre crush parmi les artistes femmes de votre génération?
PNE : (sourire) cette question est très difficile car, que ce soit de mon côté ou celui des collègues, d’aucunes sont mariées. Je ne peux pas en pleine télévision parler de la femme de quelqu’un n’importe comment. Je ne souhaiterais pas que quelqu’un parle aussi de moi parce que je suis un homme marié également. Si mon épouse ou l’époux d’une collègue suit ce que je dis, ça pourrait devenir autre chose. C’est très délicat .
LDM: On voit plusieurs icônes africaines, anciennes et nouvelles générations collaborer dans des chansons, mais Prince, vous n’y avez jamais pensé, un duo avec Youssou Ndour, Angélique Kidjo, Fally Ipupa? Jamais?
PNE: Je n’ai pas de contact avec ces artistes que vous avez cité et je n’y ai pas pensé non plus. Mais aussi, les duos pour moi ce sont des gens qu’on rencontre. Je n’irai pas chercher quelqu’un pour faire des collaborations. On fait des collaborations avec des personnes qu’on a rencontrée, qu’on connaît et avec qui on a une affinité. Mais je ne pense pas qu’avec tant d’années de carrière j’irai chercher Jésus-Christ quelque part. Non. Il faut que je le connaisse, que je le rencontre.

INTERNAUTE : Entrez en studio et faites nous danser le vrai makossa. Encadrez les jeunes qui passent leur temps à copier les autres.
PNE: Les avis , jugements et analyses restent personnels. Nous sommes dans un pays où les gens critiquent beaucoup et n’encouragent pas. Le Camerounais a perdu un tout petit peu la fierté d’être camerounais. A notre époque, être camerounais était un privilège. Cette génération est un tout petit peu perdue mais ce n’est pas de leur faute car ils ont trouvé un Cameroun éparpillé et qui a perdu sa valeur et du coup ils pensent que tout ce qui vient de l’extérieur est plus valeureux que ce que nous avons à l’intérieur. Avec l’avènement du multipartisme dont je vous parlais plus haut, on a assisté à la politisation de la musique c’est là où s’est créé ce repli identititaire. Dans les années 80 jusqu’à notre arrivée, il n’y avait qu’une musique à travers laquelle tous les Camerounais s’identifiaient, c’était le makossa. Tala André Marie, Elvis Kemayo faisaient du makossa et il n’y avait pas un problème d’appartenance. Le makossa était comme l’identité culturelle du Cameroun. Toute musique est belle et bonne à la base, ça dépend comment elle est vendue. Lorsqu’on met en guerre les rythmes bikutsi et makossa c’est qu’on est déjà en train de tuer la culture camerounaise.
LDM: Quelle solution pour que le Cameroun reprenne sa 1ere place d’antan ?
PNE : Chacun de nous doit faire son travail à son niveau et c’est ce que je m’attelle à faire. Partir du Cameroun et revenir y investir, produire des jeunes, accompagner les artistes, donner des emplois c’est ce que je fais à mon niveau. Encore plus aujourd’hui, je dis qu’il faut continuer à produire, les anciens artistes doivent produire. On ne peut pas rester comme ça et remarquer que tel ou tel artiste ne chante plus alors qu’ailleurs à 70 ans les artistes continuent à produire. La solution n’est pas politique , elle est individuelle parce que lorsqu’on attend tout du politique on ne recevra jamais.
LDM: Quel est votre top 10 des meilleurs chanteurs camerounais et africains de l’heure?
PNE : déjà je n’écoute pas tout et je ne suis pas sûr d’être suffisamment informé. Maintenant s’il faut citer quelques uns je parlerai de ceux avec qui j’ai eu l’occasion de collaborer à l’instar de Roseline Layo, Fadil Le Sorcier. Certains que j’apprécie comme Krys M, Kocee.
LDM: Droits d’auteurs, vous avez vécu votre mésaventure à la présidence de la société de gestion .Êtes-vous satisfaits de la façon dont les choses fonctionnent depuis cet épisode.
PNE: Les gens ont choisi cette polémique autour de ma nationalité qui était d’ailleurs connue avant pour m’écarter. On remarque que depuis cet épisode, la situation à la socam s’est empirée. A l’époque, la socam avait un niveau lorsqu’on regarde le conseil d’administration que j’avais mis sur pied et même ce que les prédécesseurs avaient fait, la Socam avait un certain niveau de professionnalisme et les bureaux étaient installés dans les dix régions, ça fonctionnait d’une manière ou d’une autre. Mais aujourd’hui c’est la guerre là-bas.
LDM: A côté de la musique, vous êtes à la tête du Groupe Eyango Business qui fait le BTP, Import-Export etc. C’est important d’avoir une autre source de revenu quand on est artiste au Cameroun?
PNE: Surtout au Cameroun et il n’y a aucun mal à cela. Au Cameroun, si vous vivez essentiellement de la musique ça sera très compliqué pour vous à un certain âge de responsabilité. Et je pense que la musique et l’entrepreneuriat vont de pair.
LDM: Vous avez légué cette fibre entrepreneuriale à vos filles Mina et Kamala qui sont des entrepreneures au Cameroun et à San Francisco, ont-elles abandonné la musique ?
PNE: Déjà, mes filles n’ont jamais été des artistes musiciennes. La musique n’a jamais été leur carrière. Elles sont nées et ont grandi dans la musique. C’est une passion pour elles et non un métier. Avant de sortir leur premier single, elles étaient propriétaires à leur 15 ans de leur propre label et leur marque de vêtements. Elles ont commencé l’entrepreneuriat très jeunes et ça les occupe énormément après les études. C’est pour cela qu’elles ne sont pas présentes dans la production musicale parce que ce n’est pas leur première base.

LDM: Revenons à votre actualité. « Les Enfants du Continent » est votre dernière trouvaille. Quel message voulez-vous véhiculer à travers cette chanson ?
PNE: Je pense que chaque Camerounais aujourd’hui lorsqu’il écoute ce qui se passe et regarde les réseaux sociaux et débats télévisés, il est un peu choqué parce qu’on se demande où sont finalement l’amour , le Cameroun ? Aujourd’hui au Cameroun on ne parle que de haine, tribalisme. Cette situation m’a inspirée cette chanson, je me suis dit que c’est le moment d’amener les Camerounais à l’unité, de les exhorter à abandonner le tribalisme. On doit mettre le Cameroun au centre c’est pour cela que j’ai voulu à mon niveau passer un message différent de ce qu’on entend depuis un certain temps.
Le clip est disponible sur YouTube
LDM: Quels sont vos futurs projets?
PNE: Les projets, il y en a beaucoup. Je préfère surprendre, je n’annonce pas mes projets.
LDM: Un message aux jeunes camerounais qui choisissent la route du désert, la vie facile, la célébrité rapide.
PNE: Je dis toujours aux jeunes qu’ils doivent savoir ce qu’ils veulent. Parfois nous allons chercher très loin ce qui est pourtant tout près parce que quand on a les yeux ailleurs, on ne voit même plus les opportunités qui sont à côté. En réalité, rien n’a prouvé que c’est à l’extérieur ou à l’exil qu’on réussit forcément. Je dis aux jeunes de choisir très tôt ce qu’ils veulent faire. Les temps sont très durs et ça ne date pas d’aujourd’hui. Ils doivent savoir où ils vont et avoir la vision. La vision ce n’est pas quand on a 30 ans. On peut avoir un rêve même à 10 ans.
Tout ce que je fais, c’est ce que j’ai pensé quand j’avais 5 ans, et tout ce que j’ai réalisé aujourd’hui, c’est ce que j’ai toujours rêvé faire. J’insiste sur le fait que chacun, à son niveau, essaie de voir ce qu’il a fait, avant d’aller en aventure.
LDM: Avez-vous votre carte d’électeur et allez-vous voter?
PNE: Je n’ai pas le droit de donner mon opinion. Même quand je passe un message sur Facebook, certains me rappellent que je ne suis pas Camerounais. Je n’ai pas le droit de voter.Je demande aux jeunes d’aller aux élections. Que chacun choisisse celui qui partage ses convictions. Même si demain, certains diront que leurs votes ne sont pas considérés, mais ils auront rempli leur devoir citoyen. Je les encourage d’aller aux urnes.

LDM: Merci Prince, Merci Légende.
PNE: C’est moi qui vous dis merci pour l’invitation.
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Entretien mené par Ève-Pérec N.BEHALAL