Le thème de la fête du travail cette année portait sur le « Dialogue social constructif, facteur de promotion du travail décent et de progrès social ». Descendu dans les rues de la capitale économique du Cameroun en ce jour de fête, votre magazine Laura Dave Media a constaté que la journée au lieu d’être fériée et chômée sur toute l’étendue du territoire, était plutôt bruyante de travailleurs de l’informel et de chômeurs qui déambulaient faute d’activité. Tous incriminent l’État, qui « peut mieux faire ».
La 3ème enquête de l’Institut national de la Statistique (INS) publiée en 2023 sur l’emploi et le secteur informel au Cameroun révèle que le pays enregistre un taux de chômage de 3,3%, ce qui veut dire que 600 milles personnes en âge de travailler sont sans emploi formel. L’enquête indique que cette population en âge de travailler représente 62% de la population totale, soit 16,3 millions de personnes.
Pour de nombreux camerounais rencontrés dans les rues de Douala, nulle question de célébrer quoi que ce soit quand la population, les jeunes majoritairement sont au chômage ou encore, mal rémunérés.
L’État sur le banc des accusés
Aborder la question de l’emploi au Cameroun dans les rues des grandes villes comme Douala n’est pas une mince affaire. Tous ceux qui ont été triés au hasard s’énervent à la moindre évocation du 1er mai, fête du travail. Pour la plupart, la fête du travail est réservée aux « chanceux » Dur de trouver un travail décent au Cameroun quand on n’a personne en haut :
‹‹ Je ne peux pas souhaiter bonne fête de travail aux Camerounais parce qu’il n’y a pas de travail au Cameroun et même quand on trouve un truc on est mal rémunéré ››, a déclaré dépité Mathurin, qui se débrouille dans le ville de Douala.
Un avis corroboré par Abdou qui appuie son propos par la souffrance visible et palpable des Camerounais : « beaucoup de jeunes souffrent aujourd’hui au Cameroun ».
« Le travail est tellement difficile qu’il faut travailler dur pour gagner son pain quotidien. J’ai un bac obtenu il y a 30 ans mais je n’ai jamais travaillé », a déclaré dame Honorine qui a terminé avec ce conseil à la jeunesse : « faire ce qu’elle trouve », car impossible selon elle de compter sur le gouvernement actuel : ‹‹ si le gouvernement créait même déjà des emplois ou mettait en place des politiques permettant à ceux qui travaillent déjà d’être mieux rémunérés, ce serait un début de solution. ›› Une proposition soutenue par Jean Jacques, travailleur de l’informel qui interpelle l’État :
‹‹ Le gouvernement doit croire en cette jeunesse, croire qu’on peut aussi entreprendre. Que ce ne sont pas seulement les vieux qui peuvent le faire. Ils doivent nous soutenir, nous donner la possibilité de nous exprimer, parce qu’à chaque fois qu’on veut entreprendre, il y a la commune qui nous bloque, nous casse. Aujourd’hui seulement j’ai déjà enlevé ma marchandise plus de 3 fois pour fuir les agents de la communauté. Est-ce que c’est normal ? ›› s’interroge-t-il, expliquant au passage la conséquence de ce mauvais traitement du gouvernement : la ruée des jeunes sans emploi vers l’enfer du désert.
Pour Abdou, seule « l’incompétence de ce régime est la cause de ce fort taux de chômage ». Pour lui, nulle question de pardonner : « il est temps de laisser place à un nouveau gouvernement. Celui-ci a complètement et totalement échoué sur la gestion des hommes et des ressources. Il faut de la nouveauté pour changer la donne. »
Si jeunesse savait !
14, 8 % est le chiffre mentionné dans le dernier rapport d’analyse du secteur de l’éducation et de la formation au Cameroun, l’Institut national de la statistique (INS), et qui représente le taux de chômage chez les jeunes camerounais âgés entre 25 et 35 ans, titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur. Des chiffres qui pour plusieurs personnes, présentent à suffisance les mauvais choix de filières qui aboutissent à des emplois non désirés, une formation bâclée, un manque de réelle compétence et la recherche d’argent facile dû à l’augmentation du cout de vie.
Pourtant il est connu de tous qu’‹‹ il faut aimer ce qu’on fait, chercher à travailler dans ce qu’on aime et le reste viendra naturellement ››, tel que l’a rappelé Daniel, un autre jeune chômeur qui regrette que les Camerounais n’aient pas beaucoup de choix sur les types de formation dispensées dans le pays.
Pour maman Honorine l’heure est plus que jamais au travail et non au tri, pour pouvoir avoir son pain quotidien sur la table :
‹‹ les jeunes doivent faire ce qu’ils trouvent et non rester là dans l’attente d’un argent facile ou de l’arrivée d’une manne gouvernementale. Je travaille dur comme vous voyez là, pour nourrir mes enfants et moi ››.
Malgré les problèmes évoqués et qui plombent l’émancipation des jeunes, de nombreuses structures privées, publiques et parapubliques ont tout de même célébré ce jour férié annuel adopté au Cameroun, comme chômé et payé tel que le prévoit la loi N°73-05 du 7 décembre 1973.
Marcelle Libawo