Âgé de 31 ans, Tessoh Tcheutchoua Brice Cyril de son nom d’artiste Potential est une étoile de la musique camerounaise qui depuis 2006 se fraie un chemin dans la musique et particulièrement le Reggae. Amoureux de ce registre, l’ancien élève du lycée Bilingue de Bafoussam 2 et titulaire d’une licence trilingue a offert aux mélomanes il y’a quelques semaines ”Sweet life”, du reggae dance hall. Son parcours, ses motivations et surtout ses projets en tant que autoproducteur sont à lire dans cette interview réalisé dans les locaux de Laura Dave Media.
Laura Dave Media : Bonjour Potential et merci d’avoir répondu favorable à notre invitation.
Potential : Bonjour, c’est un honneur.
Laura Dave Média : Vous détenez une licence en Trilingue. Pourquoi avoir choisi de migrer dans la musique alors que la traduction rapporte énormément d’argent ?
Potential : J’entre dans la musique étant au lycée et en effet, je devais aller faire des études en traduction à Buea mais compte tenu de certains imprévus, j’ai décidé d’aller en studio car je gagnais déjà un peu de sous.
Laura Dave Média : À cette époque, quels étaient les artistes qui vous ont influencé ?
Potential : à cette époque au Cameroun, il y avait Lauren B, Sultan Oshimi. À l’extérieur, il y avait Sean Paul,Konshens qui n’est pas très connu du grand public mais qui m’a beaucoup inspiré. Il y avait également Capleton, Kevin et Shaggy surtout.
Laura Dave Média : Étudiant à l’université, à quel moment est-ce que vous sentez que la musique c’est pour vous et qu’il est temps de vous lancer professionnellement ?
Potential : C’est mon entourage qui m’a forcé même sans le vouloir ! J’ai tout laisser pour faire la musique et les petits sous que je gagnais déjà m’ont encouragé à véritablement suivre cette route là.
Laura Dave Média : Dans la quasi-totalité de vos titres vous êtes plus dans le reggae, pourquoi ce choix alors qu’il y a d’autres rythmes que les camerounais aiment bien?
Potential : je fais parti de ceux là qui chantent ce qui les plaît et je ne fais pas le suivisme. Je trouve que je me sens plus à l’aise quand je chante du dance hall. Par contre, je monte tout style de chanson mais je m’affirme plus dans le reggae dance hall. Ce rythme permet d’exprimer les problèmes de la société et ce qui est réel.
Laura Dave Média : Quelle est la différence entre le reggae et le dance hall ?
Potential : le reggae c’est le chant, tandis que le dance hall c’est la tosse, c’est un peu dansant. Quand vous écoutez mon single « sweet life », on a l’impression que je rap sur l’instrument reggae d’où le reggae dance hall.
Laura Dave Média : De vos titres « la fille du boss », « tombé », « ma voisine », vous tournez beaucoup sur des sujets d’amour. Est-ce parce que vous faites parti des victimes d’amour ?
Potential : victime ?? personnellement, je ne le suis pas mais je raconte les histoires de mes proches. Durant mon cursus scolaire jusqu’à l’université, il y a eu tellement d’histoires d’amour à raconter et j’en ai plus d’une vingtaine.
Laura Dave Média : Parmi ces histoires d’amours, laquelle vous a le plus marqué ?
Potential : « tombé »! Dans ce titre je raconte un peu mon histoire et en même temps, j’essaie d’amener chacun à se retrouver dans ça.
Laura Dave Média : revenons au reggae. Ça fait pratiquement 42 ans que le précurseur de reggae Bob Marley est parti, vous qui êtes dans ce style musical, que pensez-vous de l’exploitation du reggae au Cameroun ?
Potential : initialement, je suis un artiste purement dance hall. Mes sons sur YouTube ont un font purement dance hall et je tiens à le préciser. Maintenant je peux répondre à la question mais pas parce que je me considère comme un artiste reggae. Au Cameroun, ce n’est pas un rythme qui marche beaucoup. On ne connaît pas plusieurs en dehors de Gaël Kimani et d’autres ont commencé et abandonné.
Laura Dave Média : il y a eu plusieurs festivals au cameroun pour les 42 ans de disparition de Bob Marley et il y avait pas mal d’artistes qui malheureusement ne sont pas connus. Qu’est-ce qui justifie le fait que ces artistes là ne soient pas autant connus ?
Potential : la plupart des reggaemen ne sont pas connus parce qu’ils restent dans le cadre traditionnel. Moi par exemple, j’essaie de mettre de la nouveauté dans ma musique en gardant un style original de chez nous.
Laura Dave Média : Les chanteurs de reggae sont souvent considérés comme des consommateurs de stupéfiants. Est-ce ton cas?
Potential : Voilà donc où vient la différence. Je suis quelqu’un de responsable et je dois montrer l’exemple à mes enfants. Et je ne pourrai jamais dire que je prend de la drogue parce que c’est interdit.
Laura Dave média : Quel message donnez-vous aux personnes qui consomment des stupéfiants ?
Potential : déjà, le fait de consommer ça ne rend pas spécial. Bien au contraire ça détruit le corps. Je conseille donc aux artistes reggae qui sont considérés comme des fumeurs de rester naturels. Certes on va dire que ça donne de la force et de l’inspiration mais ce qui est naturel doit rester naturel. C’est mon point de vue.
Laura Dave média : « sweet life » est votre nouveau single disponible sur YouTube, pourrez-vous revenir sur la préparation de ce single?
Potential : « sweet life » est une chanson qui parle de moi. J’ai composé ce titre quand je quittais de l’université de Dschang en 2015 et des difficultés que j’ai rencontré en tant que jeune qui est appelé à vivre à Douala, une ville nouvelle pour lui. Je parle de moi et je donne de l’espoir à mes jeunes frères. Je demande à ces derniers de ne pas dormir mais plutôt de travailler
Laura Dave média : Pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de le mettre sur le marché ?
Potential : Je vais vous expliquer; j’ai composé « sweet life » quand je passais les moments les plus difficiles de ma vie c’est-à-dire que quand je quittais Dschang pour m’installer à Douala où je ne connaissais personne. Je devais donc faire des vacations et aller en studio c’est à ce moment que l’idée de composer « sweet life » m’est venue. Ce n’était pas très facile pour moi car je viens d’une famille assez modeste. Pour revenir à la question, j’ai mis du temps avant de mettre « sweet life » sur le marché parce que je me suis dis quand je serai riche je le ferai. Bon je ne suis pas encore riche mais je suis mille fois mieux qu’avant et je me suis dis c’est le moment de mettre « sweet life » sur le marché.
Laura Dave média : Quels sont les messages phares que vous renvoyez au public dans cette chanson ?
Potential : l’amour du travail ! Il faut travailler, travailler, travailler. C’est le fond de « sweet life ». Il faut avoir des objectifs et être discipliné parce que tous se passe dans la discipline. Évitez la procrastination et faire chaque chose en son temps. C’est ça les messages dans « sweet life ».
Laura Dave média : nous allons revenir aux questions liées à la musique. Depuis quelques temps nous voyons des artistes qui créent leurs propres labels et vous en faites parti. Qu’est-ce qui vous a motivé à créer votre propre label Lah Sana Entertainment ?
Potential : A la base, c’était uniquement le studio mais il y avait pleins d’artistes qui venaient, je travaillais leurs chansons et en échange, ils me payaient. Après, on ne sait pas où passait les chansons. Je me suis dis pourquoi ne pas créer un label qui réunira tous ces jeunes et qui doit les faire prester d’où le concept Youth Music Awards qui est à sa 7e édition.
Laura Dave média : En terme de projet, qu’est-ce que le label prépare ?
Potential : pour cette année, nous allons lancer la compétition de musique Youth Music Awards et nous prévoyons offrir des terrains aux vainqueurs. Encourager autant qu’on peut la culture et produire des artistes.
Laura Dave média : Pour les questions de droits d’auteurs, est-ce que vous êtes inscrit à une société ?
Potential : oui, je suis inscrit à la SONACAM mais malheureusement, je ne touche pas encore. Je suis inscrit depuis 2016 et je tiens pas à entrer dans cette polémique où la plupart des artistes entrent.
Laura Dave média : pour le moment nous avons « sweet life » mais est-ce qu’il y a d’autres projets ?
Potential : naturellement, il y a un album de 12 titres qui se prépare avec plusieurs artistes. Il y a des artistes connus, pas très connus et également ceux qui ne sont même pas connus. Chanter avec les grands c’est parce que le manager a insisté. Je préfère toujours prendre ceux qui sont au même niveau que moi ou en dessous de moi pour qu’on avance ensemble.
Laura Dave média : quand vous parlez des artistes connu, est-ce que cela signifie qu’il y aura d’autres rythmes dans l’album ?Potential : je vais rester fidèle à mon dance hall et ils vont chanter. Pour le moment, je reste fidèle à moi-même car je suis en auto production et j’ai encore cette chance de décider ce que je vais faire. Si quelqu’un décide de me produire je vais peut-être me tourner vers un autre style car il a mis son temps et son argent en jeu.
Laura Dave média : En tant que producteur quelles sont les difficultés que tu rencontres ?
Potential : je suis dans les deux registres. Faire la promotion d’un artiste est très difficile. En studio, il y’a souvent des jeunes qui veulent chanter mais n’ont pas la capacité de le faire.
Laura Dave média : quel est votre mot de fin?
Potential : Que dire que je n’ai pas encore dit? J’aime toujours finir par encourager les jeunes à croire en leurs rêves, ne jamais baisser les bras et bosser chaque jour. Moi je travaille énormément et je ne dors même pas 5h de temps.
Propos recueillis par Serge Bonny et Michelle PEMAHBU ( Stagiaire )